
Plus de 3000 personnes et vingt tracteurs ont donné le 6 novembre un coup d’arrêt immédiat aux chantiers de méga-bassines dans le Marais Poitevin. (Gilles Fumey)
À Mauzé-sur-le-Mignon, des milliers de militants ont démonté une « bassine de la honte » et sa pompe. Amélie Poinssot a documenté ici cette aberration de l’agriculture industrielle, née du « Varenne de l’eau » (mai 2021), destiné à adapter l’agriculture au changement climatique. Les Français ont pris l’habitude depuis les Gilets jaunes de manifester leurs oppositions aux aberrations d’un gouvernement qui se prétend proche de l’écologie.
Le collectif Bassines Non Merci, la LPO (Ligue pour la protection des oiseaux), la Confédération paysanne, les Soulèvements de la Terre ont mobilisé trois mille opposants malgré les intimidations de la préfecture des Deux-Sèvres voulant interdire la manifestation et la FNSEA qui contre-manifestait pour entraver l’action des militants.
Comme dans les pays tropicaux où les plantations capitalistes ont dévasté – et continuent de le faire – les milieux locaux, les campagnes des régions tempérées où l’on a exporté les plantes tropicales comme le maïs, sont l’objet de conquêtes aux effets dramatiques pour l’environnement. Les 3000 militants qui ont défilé dans les rues de Mauzé ont pu constater les dégâts de l’agriculture industrielle sur l’état de la rivière du Mignon asséchée. Une situation qui sera pérennisée si les projets de bassins voient le jour. Rappelons que ce sont des centaines d’hectares qui sont dans le viseur de l’État, censés recueillir les eaux pluviales (alors que ces bassines vont assécher les nappes). Tout ça pour quoi ? Produire du maïs pour des méthaniseurs.
Les manifestants ont investi le site d’une méga-bassine, qui plus est, illégale de cinq hectares soit huit terrains de football, devant retenir 180 000 mètres cubes d’eau. Le dispositif policier n’a pas fonctionné. Les anti-bassines ont coupé à travers champs pour échapper aux gaz lacrymogènes, aux coups de matraque. Ils ont traversé un cours d’eau, plusieurs barrages de police et ont pu, finalement, entrer sur ce qu’ils appellent « la bassine de la honte ». Une future réserve d’eau qui avait déjà fait l’objet de cinq condamnations en justice.
Pour montrer l’inanité de ces projets, les militants ont démonté la pompe qui aspirait l’eau de la nappe et l’ont sécurisée pour empêcher son usage. La bassine a alors été vidée et l’eau rendue à la nappe.
Dans le camp d’en face, ils étaient quelques centaines à l’appel de la FNSEA, des Jeunes Agriculteurs et de la Coordination rurale pour protéger une bassine… vide, « sèche et morte comme leur vision de l’agriculture qui détruit les territoires et nos paysan.ne.s ».
Le porte-parole de la Confédération paysanne, Nicolas Girod, a commenté ce coup de force : c’est « une pleine et éclatante victoire, une démonstration de force que nous sommes un mouvement populaire, nombreux à nous battre pour un territoire dynamique et un projet de société juste socialement et écologiquement ».
Les manifestants se battront jusqu’au bout pour un partage de la ressource en eau. Une vision de l’eau qui l’assimile à un bien commun qui ne doit pas être confisqué, ni abîmé par les pratiques de l’agriculture chimique et productiviste.
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